Les travaux du Sommet du G5 Sahel ont pris fin ce 30 juin 2020, à Nouakchott, en présence des chefs d’État de l’organisation, de la France et d’autres partenaires stratégiques de l’organisation. La rencontre, qui était une évaluation du rendez-vous de Pau en janvier dernier, a pris des décisions importantes dans les domaines du développement économique et social, le retour rapide de la paix, la lutte contre le terrorisme…
Selon les conclusions dudit sommet, les chefs d’État du G5 Sahel ont plaidé pour un engagement militaire accru de la Communauté internationale dans la lutte globale contre le terrorisme avant d’exprimer leur reconnaissance à l’égard de l’appui crucial apporté par la France et les États-Unis, ainsi que celui de la MINUSMA au bénéfice de la Force conjointe du G5 Sahel. Ils ont en outre salué et encouragé les perspectives de déploiement des premiers soldats de la Force Takuba à l’été 2020, d’une brigade de la Grande-Bretagne en appui à la MINUSMA en 2020, et d’un contingent de 3000 hommes de l’Union africaine. Aussi, actualité oblige, les chefs d’État ont rappelé que les allégations d’exactions par des éléments des forces de défense et de sécurité avant de prendre l’engagement qu’ils feront l’objet d’enquêtes.
Ce Sommet marque, note-t-on, une nouvelle étape dans le suivi des engagements communs pris à Pau et s’inscrit dans un contexte international marqué par des développements majeurs, notamment la persistance des attaques terroristes au Sahel et la détérioration de la situation sécuritaire en Libye, avec des risques réels sur la stabilité au Sahel et dans la sous-région. Cette stabilité aussi mise à rude épreuve par la pandémie de la COVID-19 dont l’impact économique et social se fait déjà cruellement sentir.
Appel à l’annulation de la dette
Au-delà de son lourd bilan humain et sanitaire, la pandémie affecte gravement les économies des pays du G5 Sahel déjà fragiles, avec un risque de contraction sérieuse du Produit Intérieur Brut (PIB) pouvant aller, pour certains États, de 7 % à 8 % en 2020. L’organisation physique du présent Sommet dans de telles circonstances est en soi une preuve de résilience et de persévérance face à cette crise sans précédent. Tout en réaffirmant leur détermination à déployer tous les moyens nécessaires pour venir à bout de ce fléau, les Chefs d’État expriment leur solidarité aux familles éplorées et adressent leurs souhaits de prompt rétablissement à tous les malades.
Tout en remerciant tous les partenaires qui ont déjà manifesté leurs soutiens aux Plans de riposte élaborés par les pays du G5 Sahel, les Chefs d’État du G5 Sahel ont saisi cette opportunité pour renouveler leur appel à l’annulation de la dette extérieure des pays du G5 Sahel, tel que formulé dans la « Déclaration de Nouakchott sur la pandémie de COVID-19 » issue de la session extraordinaire de la Conférence des Chefs d’État du G5 Sahel du 27 avril 2020.
Préservation des droits de l’homme
Examinant la mise en œuvre de la Feuille de route de Pau en lien avec l’évolution de la situation dans l’espace du G5 Sahel, les Chefs d’État ont salué les efforts accomplis par l’ensemble des acteurs aussi bien des États sahéliens que de leurs partenaires internationaux. Ils ont rendu un vibrant hommage aux victimes civiles et militaires des conflits en cours au Sahel. Les Chefs d’État du G5 Sahel ont rappelé que les allégations d’exactions par des éléments des forces de défense et de sécurité feront l’objet d’enquêtes et, si les faits sont avérés, de sanctions exemplaires.
Les Chefs d’État se sont félicités du lancement officiel de la « Coalition pour le Sahel » le 28 avril dernier dans le cadre d’une visioconférence entre l’Union européenne et le G5 Sahel et de la tenue de la première réunion ministérielle de cette coalition le 12 juin 2020. Ils ont salué la forte participation de l’ensemble des partenaires du G5 Sahel à cette réunion, et ont appelé à la consolidation de ladite Coalition, ainsi qu’à la détermination de son architecture et des outils de sa gouvernance, en étroite collaboration avec le Secrétariat exécutif du G5 Sahel.
Plan d’actions prioritaires CEDEAO
La lutte contre le terrorisme se poursuit avec détermination et une meilleure cohérence d’ensemble.
Les Chefs d’État du G5 Sahel ont salué l’engagement des effectifs supplémentaires de la Force Barkhane au cours du dernier semestre et l’opérationnalisation du Mécanisme de Commandement conjoint facilitant la coordination entre la Force conjointe du G5 Sahel et la Force Barkhane. Ils se sont félicités de la reprise d’opérations soutenues dans la zone des Trois frontières, des succès enregistrés par les forces nationales, la Force conjointe et les forces internationales. En outre, ils ont salué la neutralisation du chef d’AQMI le 3 juin 2020 dans la région de Tessalit par la Force Barkhane et ses alliés.
Les Chefs d’État ont salué, une fois encore, le succès de l’opération éclaire « Colère de Boma » dans la région du Lac Tchad au mois d’avril 2020 contre les factions de Boko Haram qui imposent un autre front au Tchad et au Niger, méritant également l’attention de la communauté internationale.
Les Chefs d’État saluent également l’adoption par la CEDEAO d’un plan d’actions prioritaires 2020-2024 pour éradiquer le terrorisme dans l’espace CEDEAO, encouragent sa mise en œuvre effective et saluent les concertations avec les parties prenantes. Par la même occasion les Chefs d’État apprécient grandement, dans le cadre de ce plan d’action, la mise à disposition du Mali, du Burkina Faso et du Niger, d’un soutien en vue de participer à la sécurisation des trois frontières de la Zone LIPTAKO.
Les Chefs d’État ont néanmoins noté la persistance d’un second front dans la zone du Lac-Tchad au Niger et au Nigeria et un renforcement des capacités terroristes locales dans ces zones, remettant en cause les résultats obtenus lors de l’opération « Colère de Boma ». Ils ont également noté l’extension de la menace terroriste en direction de la Côte d’Ivoire suite à l’attaque récente de la garnison ivoirienne de Kafolo.
Les Chefs d’État ont exprimé leur préoccupation face à l’expansion de la menace terroriste dans la sous-région et ont souligné l’urgence d’une action collective et énergique en vue de l’éradiquer.
Les Chefs d’État ont noté avec satisfaction la redynamisation progressive du cadre d’échange, d’analyse et d’exploitation coordonnées des renseignements à travers le processus d’institutionnalisation de Plateformes nationales de Coopération en matière de Sécurité (PCMS).
Retour de l’État et des administrations
Les Chefs d’État ont salué l’engagement et le rôle déterminant de l’Union européenne en matière de conseil, de formation, d’équipement et d’infrastructures. Ces efforts sont valorisés et mis en cohérence dans le cadre du Partenariat pour la sécurité et la stabilité au Sahel (P3S).
Tout en saluant l’engagement et les apports des autres partenaires, notamment des États-Unis, les Chefs d’État ont insisté sur la nécessité de poursuivre et de renforcer l’appui en équipements des Forces de défense et de sécurité des États membres du G5 Sahel et de la Force conjointe. Ils ont également encouragé l’élargissement et la diversification des activités de soutien de tous les partenaires à tous les pays membres du G5 Sahel, y compris en matière de formation, en fonction des besoins et spécificités de chacun.
Le retour de l’État et des administrations dans les zones fragiles est engagé.
Les Chefs d’État ont pris note du redéploiement progressif des administrations et du retour de certains déplacés dans leurs localités d’origine à la faveur des opérations de sécurisation. Ils ont relevé que des efforts restent à faire, non seulement pour le retour effectif des populations, mais aussi pour la mise en œuvre de programmes de développement entravée ou retardée avec la survenue de la pandémie du coronavirus.
Ils ont souligné l’importance de mener à bien, dès que possible, des initiatives à l’échelle régionale, nationale et locale, en faveur du dialogue intercommunautaire, de la réconciliation et du traitement des questions de fond sur le partage des ressources ou les litiges fonciers.
Les Chefs d’État soutiennent l’engagement permanent et multiforme de l’Union européenne à travers des missions de renforcement de capacités des forces de sécurité intérieures (EUCAP) en partenariat avec les agences des Nations-Unies, notamment l’Office des Nations-Unies contre la Drogue et le Crime (ONUDC) et le Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme (HCDH), et estiment que cet engagement doit être renforcé pour l’ensemble des pays du G5 Sahel.
La force Force Takuba se précise
Tout en se félicitant de la dynamique positive enclenchée, les Chefs d’État ont souligné le besoin d’intensification du combat sur tous les fronts des forces nationales et internationales contre les groupes terroristes et ont appelé à la poursuite de la mise en œuvre de la Feuille de route de Pau et du Plan d’action de la Force conjointe du G5 Sahel.
À cet égard, les Chefs d’État ont renouvelé leur engagement à ne tolérer aucune violation des droits de l’homme, et au respect du droit international humanitaire. À cet effet, ils se sont engagés à renforcer la judiciarisation des champs des opérations, notamment en poursuivant la montée en puissance de la composante prévôtale des armées nationales et de la Force conjointe, et l’adhésion de l’ensemble des forces de défense et de sécurité au cadre de conformité en matière des Droits de l’homme.
Les Chefs d’État du G5 Sahel ont plaidé pour un engagement militaire accru de la Communauté internationale dans la lutte globale contre le terrorisme au Sahel. Ils ont exprimé leur reconnaissance à l’égard de l’appui crucial apporté par la France et les États-Unis, ainsi que celui de la MINUSMA au bénéfice de la Force conjointe du G5 Sahel. Ils ont salué les perspectives de déploiement des premiers soldats de la Force Takuba à l’été 2020, d’une brigade de la Grande-Bretagne en appui à la MINUSMA en 2020, et d’un contingent de 3000 hommes de l’Union africaine. Ils ont, en outre, salué le renouvèlement et le renforcement du mandat de la MINUSMA.
L’Accord pour la paix
Conscients du fait que l’action de la Force conjointe du G5 Sahel s’inscrit dans une perspective de long terme dans la lutte contre le terrorisme au Sahel, les Chefs d’État du G5 Sahel ont salué les propositions faites par le Secrétaire Général des Nations Unies pour son renforcement et réitéré leur demande pour un financement pérenne de la Force, ainsi que l’octroi d’un mandat sous le Chapitre VII de la charte des Nations-Unies. Dans l’attente, ils ont salué le soutien logistique apporté par la MINUSMA dans le cadre d’un mécanisme de financement coordonné par l’Union européenne et sollicité de nouvelles contributions pour soutenir l’action des forces nationales et régionales du G5 Sahel afin qu’elles acquièrent leur autonomie et s’approprient la situation sur le terrain.
Les Chefs d’État ont réitéré leur soutien à la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger. Sur le volet sécuritaire, ils se sont félicités de la reprise du processus de Désarmement Démobilisation Réintégration (DDR) et du retour des premières unités des Forces armées maliennes reconstituées (FAMAR) au Nord, qui reste cependant à finaliser à Kidal. Sur les volets politique, institutionnel et de développement, ils ont constaté des progrès notables, mais insuffisants, et ont appelé à la poursuite des efforts des différentes parties.
Les Chefs d’État ont également salué l’initiative de la CEDEAO d’envoi d’une mission ministérielle au Mali afin de trouver une issue pacifique à la situation préoccupante que traverse le pays. Ils condamnent toute violence et exhortent les parties au dialogue. Par ailleurs, ils encouragent la CEDEAO à poursuivre les efforts en vue d’aboutir à un apaisement social indispensable à la mise en œuvre des réformes et à la lutte contre le terrorisme.
Le prochain sommet se tiendra courant 2021 dans un pays du G5 Sahel et associera la Coalition pour le Sahel
Source : INFO-MATIN